La piscine du ranch Sumner :
Le temps est déjà chaud ce matin. Le vent de Santa Ana amène une douce brise - le seul soulagement du soleil brûlant de l'été. Anne est étendue de tout son long et regarde le ciel à travers ses lunettes de soleil. Elle porte un peignoir en coton qui protège sa peau des rayons du soleil et, en dessous, un maillot de bain une pièce au cas où elle voudrait plonger dans la piscine afin de se changer les idées. En ce moment, c'est le dernier numéro du magazine Cosmopolitain qui captive son attention.

Ah cette fichue mode! Je ne suis plus dans le coup avec cette amnésie. Je me demande si Carlos a conservé les derniers numéros ? Hé! Je me demande ce que je vais avoir pour Noël?

Elle est interrompue dans ses pensées quand le magazine lui est arraché des mains et remplacé par une lourde encyclopédie ouverte à la page : “BUENOS AIRES.” “Qu'est ce que tu fais?” Anne se met à hurler quand elle voit Greg jeter le magazine dans la piscine. Il prend une chaise, s'installe à côté d'elle et commence à la regarder fixement.

Elle jette un œil sur l'encyclopédie. “Cela semble être une ville charmante. Nous allons en Argentine?” demande Anne excitée. “Ce serait formidable de s'éloigner un peu.” Elle referme le livre. “Une fois complètement remise, nous pourrons voyager sans problème.”

“Oh, je pense que tu as suffisamment récupéré,” dit Greg froidement. Il la soulève et la jette dans la piscine. Le corps de Anne plongeant l'eau émet un bruit tel qu'il couvre ses cris.

Elle remonte à la surface et nage vers le côté opposé. “Greg! Espèce de GROSSIER personnage! Quel est ton problème? Quel rapport avec Buenos Aires? Et je viens juste de colorer mes CHEVEUX!”

“Et maintenant, ça va mieux? Nage, Annie, nage!” Greg fait le tour de la piscine pour la rejoindre et la tire hors de l'eau. Elle se tient devant lui, dégoulinante, ses mèches blondes tombant sur ses yeux.

“Toi et l'italien étaient à Buenos Aires deux nuits avant l'explosion! Que faisiez vous là-bas?”

“Je … Je ne suis jamais allée à Buenos Aires. J'étais à Rio, pour le Carnaval. C'était vraiment amusant.”

“Tu m'as dit ici même que tu te rendais dans un centre de thalassothérapie à Palm Springs, et au lieu de ça, tu es allée à Buenos Aires. POURQUOI?”

“J'y étais? Je ne sais pas. Je préférerais passer mes vacances à Palm Springs plutôt que dans une ville où je ne suis jamais allée.”

“Ce n'était pas à Noël, Anne! Arrête ta comédie! Je commence à perdre patience.”

“Greg, Je suis sérieuse. Je ne m'en souviens pas! Je ne me souviens pas avoir vu Nick, Je ne me souviens pas d'une bombe, ou bien était-ce un coffre fort? Depuis que je suis sortie de l'hôpital, tu ne me parles que de Nick et de ce coffre fort. Maintenant tu me dis que je me suis rendue à Buenos Aires? Je ne te crois pas! Je te crois quand tu me dis qu'un an s'est écoulé. C'est évident. Mais parcourir l'Argentine à la recherche d'un coffre-fort ?” Anne roule les yeux.

“Et San Francisco,” ajoute Greg. “Tu te rappelles de ta petite visite à la Vicomtesse Constance Abbington von-”

“-von Bralinburg?” Anne finit avec surprise. Soudainement, elle se met à rire à gorge déployée. “Maintenant, je SAIS que tu mens! MOI une visite à Constance? Elle me déteste, depuis ce qui s'est passé au casino de Monte Carlo. Qui t'a parlé d'elle? Claudia? ATTENDS UNE SECONDE!” Anne regarde Greg, inquiète, et commence à s'éloigner de lui.

Il avance vers elle, embarrassé. Il avait mentionné son alibi de San Francisco en espérant la coincer et prouver qu'elle feignait l'amnésie, mais il n'était pas préparé à cette soudaine réaction. “Quoi? Quelque chose te 'revient en mémoire' ?” demande-t-il, sceptique.

“Je suis sous le choc!” crie Anne. “Ne t'approche pas de moi!” Elle s'éloigne de nouveau. “Toi, Claudia et probablement ce traître de Nick êtes responsables de quelque chose et vous essayez de me faire porter le chapeau parce que j'étais dans le coma depuis le tremblement de terre! Où est-elle? Où est Claudia Whitaker?” Anne regarde autour d'elle. “C'est le jeu le plus malsain auquel elle n'ait jamais joué!”

Le silence de Greg est assommant. Anne le regarde d'un air interrogateur. “Aha! C'est ça, n'est-ce pas? Bien, je rentre me sécher. Va donc faire avaler tes couleuvres à quelqu'un d'autre, Gregory. Et dis à Claudia et à Nick de faire de même! Morte? Ben voyons! Claudia était en excellente santé et toujours aussi odieuse la dernière fois que je l'ai vue.” Anne repart en direction du ranch, son peignoir détrempé? Ses sandales claquent sur le sol. Au moment de partir, elle aperçoit son magazine, sa serviette et sa chaise longue qui flottent dans la piscine. “Regarde le désordre que tu as provoqué pour celui qui va devoir nettoyer la piscine. Et en plus mes lunettes de soleil Armani sont au fond.”

Rouge de fureur, Greg la rattrape, et la tire par le bras, l'obligeant à le suivre.

“OH! Laisse-moi tranquille, Greg! Où est-ce que tu crois que nous allons?” Il la tire dans sa direction d'un pas vif. Ses sandales claquent sur le sol alors qu'ils s'éloignent du ranch. Le vent de Santa Ana a repris vigueur. La poussière se soulève et le feuillage des arbres donne naissance à un bruit oppressant, tel un lourd carillon.

“Greg! Ralentis! Où allons-nous? Aux écuries? Dis-moi où nous allons? Est-ce que tu comptes me faire monter à cheval maintenant que tu m'as forcé à nager? Est-ce une sorte de thérapie physique tordue?”

Son pas rapide et silencieux lui indique qu'ils ne vont pas aux écuries. Le vent souffle de plus en plus, bousculant tout sur son passage. Non loin d'eux les chevaux s'énervent.

“Je demande à savoir où nous allons! Tu me prends pour une imbécile depuis des semaines, mais maintenant c'est fini!” Anne voit une pierre plantée dans la terre et son visage pâlit quand elle comprend de quoi il s'agit. Un voile glacé emplit son corps de la tête aux pieds.

“Non, Greg! NON! Je ne veux pas y aller! S'il te plait!” Elle plante ses pieds dans la terre. Greg la soulève. Elle lui donne un coup de pied mais il ne déserre pas son étreinte et ils continuent de se rapprocher. “Greg! Arrête ça! Je ne veux pas! S'IL TE PLAIT! Non! Je ne veux pas voir ça!”

Il l'amène devant la pierre tombale. Elle se couvre les yeux à l'aide de ses mains et commence à trembler comme si elle avait de la fièvre.

“Regarde ça! Tu trouves ça AMUSANT? REGARDE!” Greg attrape la main d'Anne, la forçant à regarder la pierre tombale, sur laquelle on peut lire, “CLAUDIA SUMNER WHITAKER, NOTRE MERE ET GRAND-MERE ADOREE, 1941-1998.” Le vent souffle de plus en plus. Anne crie et s'effondre sur les genoux, et commence à émettre des sanglots hystériques.

“Elle est MORTE, Annie! Ce n'est pas un jeu!”

“Je ne m'en souviens pas!” Anne réprime ses sanglots.

“ELLE est morte durant le tremblement de terre, mais tu sais qui d'autre est mort, grâce à tes manigances?! Tom Ryan!”

“Greg! S'il te plait!” Anne ne parvient plus à contenir ses sanglots.

“Il y a eu une explosion, Anne! Tu as failli être tuée; J'ai failli être tué!” Greg crie aussi fort qu'il le peut. “Mais nous ne sommes pas les seuls! PAIGE! MEG! KATE! MACK!”

Anne se bouche les oreilles. “Arrête ça! ARRÊTE!”

Greg la tire vers le haut, et saisit ses deux bras. Son visage est tellement rouge qu'Anne ferme les yeux. “QUI était en possession du coffre-fort à Buenos Aires?”

Anne secoue la tête en arrière puis en avant, les yeux toujours fermés. “je ne sais pas!” Son mascara se mélange à ses larmes sur son visage.

“Qui a déposé cette bombe qui a failli tous nous tuer? QUI?”

Elle ouvre les yeux et le regarde en face. “Je te le jure, Greg! Je ne me souviens de rien! S'IL TE PLAIT!” Elle continue à sangloter. Il la lâche, et elle tombe sur le sol.

Anne est étendue sur la tombe, le visage dissimulé derrière ses mains. Ses sanglots s'atténuent. “Je ne me souviens pas!” répète-elle avec une voix inaudible. “ Je ne me souviens pas!” Le vent qui souffle de plus en plus fort fait du bruit dans les arbres aux alentours.

Greg est pris d'un sentiment de compassion. Puis il fronce les sourcils. “Tu es au bout du rouleau, Annie,” continue-t-il d'une voix calme. “Ton petit ami italien est mort. Tu n'as plus personne avec qui comploter. Et il y a un fou en liberté qui s'amuse . Qui était derrière tout ça?”

“Greg, s'il te plait!” Anne est toujours étendue sur l'herbe, en pleurs. “Je ne me souviens pas!”

“Et je m'en fiche. Tu as un mois pour trouver un autre endroit où habiter. Jusque là, tu peux continuer à dormir dans la chambre d'ami. Passé ce délai, je ne veux même plus que tu me rendes visite. Je ne veux plus te voir, ou t'entendre. Ou même entendre parler DE toi. Comment as-tu pu en arriver là, Annie? Comment la femme qui vivait à Manhattan il y a des années a pu tomber si bas? Comparée à ta métamorphose Hamlet ressemble à une sitcom.”

Greg rejoint le ranch d'un pas lourd et ferme, laissant Anne allongée devant la tombe de Claudia. Les sifflements du vent sur l'herbe recouvrent les pleurs humides d'Anne et fouettent la pierre tombale en marbre.

 

La maison de la plus récente résidente de Seaview Circle :

Trop qualifiée! Ce mot résonne en leitmotiv dans la tête de Paige alors qu'elle rejoint la maison qu'elle a louée depuis peu. Elle gare sa voiture et descend, prenant avec elle son attaché case et observe les lieux puis se dit, J'adore habiter ici. Je n'aurais jamais pensé que la vie en banlieue était faite pour moi. Quand j'habitais ici, il y a longtemps, j'étais impatiente de quitter la maison de Mack. Et parfois, c'est dur d'admettre que même Abby a réussi à s'offrir une splendide propriété. Le trou où je vivais avant était un enfer! Maintenant si je pouvais seulement trouver un emploi, je pourrais alors rester habiter ici. Elle soupire et marche jusqu'à la boîte aux lettres où elle relève son courrier.

Très bien. Mon journal de Wall Street est toujours envoyé à mon ancien appartement, mais Macy's et Citibank n'ont pas manqué de m'envoyer leurs factures.

“Mauvaises nouvelles?” une voix l'interrompt dans ses pensées. Elle lève les yeux et voit Gary qui marche à côté d'elle.

“Gary. Comment va mon propriétaire préféré aujourd'hui?” demande-t-elle, essayant de lui rendre son sourire, mais elle est tellement fatiguée qu'elle parvient seulement a esquisser une petite grimace.

“Mieux que toi, j'ai l'impression,” dit Gary avec une note de souci. “Toujours à la recherche d'un emploi?”

“On peut appeler ça comme ça,” répond Paige. “Entre, je t'offre un thé glacé.”

“OK,” Gary la suit à l'intérieur de la maison. Elle retire ses chaussures à talons et les jette un peu plus loin, puis elle pose son courrier sur une table. Gary ne peut s'empêcher de remarquer la présence de factures non ouvertes.

“Gary, tu as été si gentil avec moi. Tu m'as laissé m'installer dans cette magnifique maison sans payer de caution ni de premier mois de loyer. Maintenant, ça fait presque un mois que j'habite ici et tu n'as toujours pas touché un centime. Je comprendrais si tu veux que je m'en aille, afin que tu puisses louer la maison à quelqu'un d'autre.”

“Il n'y a pas urgence. Je préfère avoir ici quelqu'un que je connais et en qui j'ai confiance. Tu finiras bien par retomber sur tes pieds,” dit Gary sur un ton rassurant. “et je suppose que tu es toujours sans emploi.”

“Malheureusement. Jusqu'ici mes perspectives les plus lumineuses ont été d'être la caissière principale à Knotswear, réceptionniste pour un avocat vraiment minable, ou travailler dans l'équipe de nuit de la station service du coin. T'ai-je mentionné que le dernier employeur m'offrait le café à volonté et la moitié de mes casse-croûtes? Tentant, n'est-ce pas?”

“C'est bon de voir que tu n'as pas perdu ton sens de l'humour,” dit Gary avec un rire chaleureux.

“Non. Pas encore. Bien que, désespérée comme je suis, je pourrais aller voir Greg et lui demander de me réengager à nouveau. Abby serait ravie. J' imagine qu'elle pourrait me proposer une place de domestique. Je préfère encore retourner vivre chez Mack et Karen plutôt que de tomber si bas,” dit-elle avec un brin de provocation dans les yeux tout n servant à Gary un verre de thé glacé.

“Est-ce que tu as du sucre?” demande Gary.

“J'en ai déjà mis une cuillerée à café. Juste comme tu aimes,” répond Paige qui s'assoit en face de lui.

“Tu t'en rappelles!” dit Gary avec étonnement. “On faisait du bon boulot ensemble sur ce projet de complexe sportif. Sans parler de "Océan et Energie".”

“Oh oui, C' était une association réussie!” Paige rit. “Et maintenant, qui n'a pas perdu son sens de l'humour?”

“Je veux dire quand on travaillait ensemble de manière génale, pas seulement "Océan et Energie". En fait, c'est de ce genre d'aide dont j'aurais besoin en ce moment,” dit-il vaguement.

“Quel genre d'aide?”, demande Paige, prise d'un sentiment de doute.

“Ne soit pas si suspicieuse. Je voudrais t'offrir un emploi.”

“C'est vraiment gentil de ta part, Gary, mais tu n'as pas à faire ça. Je trouverai bien un moyen de payer le loyer. Je te le promets,” dit Paige, qui rechignait à l'idée d'accepter la charité de quiconque lui offrirait un emploi.

“Crois-moi, je ne te fais pas la charité. J'ai besoin de quelqu'un à ce poste, et si ce n'est pas toi, ce sera quelqu'un d'autre avec les même qualifications. Ça t'intéresse?”

“Je devine que je devrais accepter, n'est-ce pas? Je veux dire, tu es mon propriétaire,” dit Paige, toujours hésitante envers son offre. Elle a oublié ce que ce que c'était une opportunité qui tombe du ciel. “Alors, Tu aurais besoin de moi pour faire quoi? Répondre au téléphone?”

“Non. Tu es trop qualifiée pour ce genre de choses,” répond Gary, ne remarquant pas sa crispation à l'entente du mot surqualifiée. “Ce dont j'ai besoin c'est d'une directrice commerciale. Tu es au courant que j'ai entrepris une campagne pour le projet de relogement de personnes défavorisées. J'ai remporté l'adjudication publique pour les travaux de construction. Et d'une façon ou d'une autre le Groupe Sumner a la possibilité d'investir dans notre projet. J'ai besoin d'une équipe qui puisse m'aider à manœuvrer avec Abby et Sumner. Je sais que tu peux leur en donner pour leur argent … et garder un oeil sur le mien.”

“Tu plaisantes, n'est-ce pas? Un vrai poste de gestionnaire, avec en plus la possibilité de défier Greg et Abby! Je crois que je vais décevoir pas mal de gens au salon local quand je refuserai leur offre de répondre au téléphone pour 6 dollars de l'heure. Je ne peux pas laisser une chance pareille de devenir un obstacle pour Abby!” dit Paige en souriant alors que ses yeux s'illuminent.

“Très bien. Maintenant, nous pourrons discuter de ton salaire un peu plus tard …” commence Gary.

“Tu as toujours été excessivement juste avec moi, Gary. J'accepterai ce que tu me proposeras. L'idée d'aider ces gens à prendre un nouveau départ me plait beaucoup,” dit Paige heureuse. “Ça sera encore mieux que ce dont j'ai toujours rêvé. Maintenant, Comment allons-nous nous y prendre avec Le 'Pingre' Sumner?”

“En fait, J'ai déjà commencé à m'en occuper par téléphone. Quand ce sera le moment de les rencontrer, nous serons prêts. Pour le moment, je dois partir. Pourrais-tu commencer demain? Nous n'avons plus une seule minute à perdre.”

“Bien sûr que oui. Merci, Gary. Tu ne peux pas savoir ce que ça représente pour moi,” dit Paige avec gratitude.

“Je me trouve dans une situation tendue. On se voit demain,” Gary marche lentement en direction de la sortie alors qu'elle le raccompagne.

“Bye,” dit-elle alors qu'elle pense, joyeuse : Oh, Abby, Abby, Abby …tu ne sais pas dans quoi tu t'es engagé. Je ne te laisserai pas gagner cette fois-ci. Et Greg va se mordre les doigts de ne pas m'avoir dans son camp.

 

Et Maintenant...

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