Le cabinet juridique Mackenzie & Associés :

Le vent de Santa Ana souffle furieusement dans le quartier historique de Knots Landing, là où Mack a choisi d'établir ses bureaux. Peut-être a-t-il choisi ces lieux parce que les vieux immeubles aux alentours lui rappellent sa jeunesse à New York. Ou bien est-ce le loyer modéré des bureaux qui ont eu sa faveur, contrairement aux immeubles que Schulman & Clark ont bâtis face à l'océan. Mack est train d'étudier la liste des étudiants en biologie du professeur Harry Jacobs. Il s'agit de l'année académique 1997-1998 à l'Université de San Francisco. Soudain, une puissante rafale de vent traverse l'immeuble. Mack se retrouve dans l'obscurité totale.

Bon sang! Il ouvre le tiroir de son bureau et en ressort une lampe de poche. Le téléphone retentit. Après avoir allumé sa lampe, Mack décroche. "Mackenzie," dit-il sèchement.

Les perturbations radioélectriques rendent difficilement compréhensibles les paroles de son interlocuteur. Mack reconnaît toutefois rapidement la voix de son fils adoptif Jason Lochner : "...Mack... mauvaise... Hôpital de Chicago..."

"Jason! J'ai du mal à t'entendre. Une tempête a coupé le courant et..."

"...es là? ...pas t'entendre..." Les interférences cachent complètement la voix de Jason.

"Jason!" Mack raccroche et reprend le combiné immédiatement afin de rappeler Jason. Il frissonne tout à coup. Au lieu de la tonalité, il entend la musique d'une cornemuse au téléphone. Que se passe-t-il, nom d'un chien?

Il entend des rires étouffés derrière lui. Il éclaire le coin de son bureau à l'aide de sa lampe de poche. Personne. Pourtant, les rires se font plus intenses. Mack sent ses poils se hérisser au moment où il reconnaît la voix de cette personne.

Il se retourne à nouveau et pointe la lampe dans la direction d'où proviennent les rires. "Oh, Patrick, mon garçon, la tête que tu fais en ce moment vaut bien ce détour dans ce monde ! Moi qui craignais sans cesse le pire avec toi."

"Non, tu n'es pas là!" proclame Mack avec défiance. "C'est un mauvais rêve. C'est ce truc chinois que j'ai mangé tout à l'heure."

"Ton existence est devenue un mauvais rêve, mon garçon. Comme d'habitude, tu as tout gâché. Tu n'as jamais su faire quelque chose de valable."

"Va hanter d'autres âmes en peine, papa. Je ne veux pas te voir." Mack se retourne et voit son père à nouveau en face de lui.

"Tu ne vas pas te débarrasser de moi aussi vite, comme tu l'as fait à la fin de ma vie, lorsque j'étais seul à New York."

Mack continue d'ignorer le spectre de son père et reprend l'étude de sa liste de noms qu'il a obtenue à l'Université de San Francisco.

"C'est ça, Patrick, attaque-toi à une cause perdue et ne t'occupe pas des priorités. Pourquoi t'acharnes-tu au sujet de cette Laura?"

Mack relève la tête, intrigué. "C'était une amie! Ça t'est bien étranger puisque tu n'as jamais eu d'amis."

"Oh! Bien, mon garçon! Tu as toujours l'esprit combattif des Mackenzie en toi! La côte Ouest ne t'a pas adouci au point d'oublier tes origines, même si tu as fini par oublier ta famille et ton clan.”

"Epargne-moi tes boniments à la Braveheart, papa. Tu as abandonné notre famille pendant des années, tu as menti à maman et tu nous as blessés, moi et Maggie."

"Je n'ai jamais fait de mal à ta soeur." "Oh si tu lui as fait du mal avec tes propos cruels. Moi, en plus de tes affronts, j'avais droit aussi à tes poings."

"Et je suis mort seul des suites d'une leucémie qui a aussi emporté mes frères. Après que je sois venu te voir et t'implorer de m'aider. Tu n'en as rien fait. Oeil pour oeil, hein, Patrick?"

"Oui," acquiesce Mack. "Parfaitement."

"Espèce de tête de mule! Tu as réussi. Pourquoi crois-tu que je suis venu ici? Pourquoi t'acharnes-tu tellement à savoir ce qui est arrivé à Laura?"

"Est-elle morte? Est-elle avec toi?"

"C'est la question en or. Je ne vais pas te répondre. Il va falloir que tu te débrouilles pour obtenir la réponse. Pourquoi ce besoin de savoir?"

"Laura est la mère biologique de ma fille. Meg est en danger à cause de ce fou de Jacobs."

"Peut-être mais ça ne répond qu'à une partie de la question." Pete Mackenzie s'approche de son fils et le regarde dans les yeux. "Meg est assez grande pour faire face à la vérité sur sa mère naturelle. Ce n'est pas la raison profonde qui motive tes recherches sur Laura." Pete met ses deux mains sur le bureau de Mack et lui adresse un regard de feu. "Tu ne comprends pas sa décision d'être partie pour mourir seule! Tu crois que c'était un mauvais choix! Tu veux savoir pourquoi elle a agi ainsi, n'est-ce pas? Ces idées te hantent, hein, mon grand? C'EST PAS VRAI?"

"Oui!" Mack a les larmes aux yeux et baisse la tête.

"Pourquoi donc, Patrick? POURQUOI?" Le visage de son père exprime la colère.

"Parce que toi aussi tu es mort seul!" répond Mack en sanglotant. "Parce que je t'ai laissé mourir seul alors que c'était ta plus grande crainte. J'ai détesté tout ce que tu as fait à maman et Maggie. Je ne voulais pas que Laura meurt dans la solitude, comme toi. Elle aurait dû s'éteindre au milieu des siens, elle était pleine de qualités. Je t'ai laissé mourir pour te punir et elle a choisi de mourir seule pour se punir elle-même. Elle n'avait pas le droit!”

Un sentiment de chaleur recouvre Mack. Il relève finalement la tête et aperçoit le sourire de son père. Un sourire si doux que Mack en a le souffle coupé. Il n'avait jamais vu pareil sourire sur le visage de son père.

"Pat, tu t'investis tellement dans les batailles entre le bien et le mal que tu ne parviens plus à distinguer ce qui est mieux. Je vous ai élevés toi et Meghan et j'ai traité votre mère de la seule manière que je connaissais. La manière dont moi-même et tes oncles avions été élevés. Je pourrais rappeler ton vieux grand-père ici. Tu en aurais la frousse de ta vie mais je vais t'épargner ça. Je suis fier de toi, tu sais, mon garçon. Tu te souviens combien j'insistais sur l'importance du clan Mackenzie et sur le fait que toi et Meghan étiez les derniers de la lignée?"

Mack acquiesce de la tête alors que Pete continue. "Et bien, j'avais tort. A tous les points de vue. C'est ce que j'ai appris depuis ma mort. Le nom de famille ou l'appartenance à une lignée n'a aucune espèce d'importance. Ce qui compte, ce sont les gens qui t'entourent, qui t'apportent leur amour. C'est ça un clan et tu en as créé un véritable, Patrick. Karen et ses enfants, Paige, Meg, Jason, Gary et Val sont la meilleure famille dont on puisse rêver. Ne laisse pas tes ressentiments envers moi détruire tes relations avec ceux qui ont besoin de la force d'un clan familial que toi tu peux leur fournir. Tu n'as plus parlé avec Michael depuis qu'il est parti. Quand as-tu appelé ta soeur pour la dernière fois?"

"J'ai demandé à Maggie de venir me rendre visite. Elle n'est jamais venue."

"Ta mère aussi te regarde, Pat. Tu sais que Michael souffre beaucoup de la disparition de sa petite fille. Michael et Holly pourraient bénéficier d'un peu de toute l'attention que tu portes à cette Laura. Ne gaspille pas tout ton temps dans la découverte du mystère qui entoure la disparition de ton amie, alors que d'autres personnes de ton clan ont-elles aussi des problèmes, parfois pénibles. Tu ne voudrais pas que d'autres personnes meurent seules."

Mack a évité le regard de son père pendant toute sa tirade. Il lève finalement le regard et voit qu'il n'est plus là.

Il soupire et s'asseoit dans l'obscurité silencieuse pendant quelques minutes. Tout à coup, il jette un oeil à sa montre à l'aide de la lampe de poche et saisit le téléphone afin de composer un numéro.

"Bonjour! Vous êtes au bon endroit mais au mauvais moment. Diana et Michael sont absents pour l'instant mais laissez-leur un message et ils vous recontacteront au plus vite." Mack sourit en entendant la voix joviale de Diana. Il s'éclaircit la gorge.

"J'espère que tout va bien à Manhattan. C'est Mack. Je... je voulais juste voir comment vous alliez. Appelez-nous. Vous savez à quel point votre mère adore entendre que tout va pour le mieux, et... euh... moi aussi d'ailleurs. A bientôt. Au revoir!" Mack raccroche et sent un étrange sentiment l'envahir. Il se masse les tempes.

Le vent s'est calmé et la musique très faible d'une cornemuse se fait entendre au loin. Je travaille trop. Je perds la tête.

Le réseau électrique se remet à fonctionner tout à coup, à l'instant même où le téléphone retentit.

Mack sursaute et saisit le combiné. "Michael?" "Non, Mack, c'est Jason. Ça fait une demi-heure que j'essaie de te contacter."

"Il y a eu une panne de courant et les lignes étaient hors service. Jason, où es-tu? Que se passe-t-il?"

 

La maison Cunningham :

Le vent souffle à l'extérieur et sort Kate de son assoupissement. Elle est sur le grand lit matrimonial. Les couvertures n'ont pas encore été défaites. Elle se retourne et voudrait embrasser Brian mais il n'est pas là. Après un soupir, elle souhaite allumer la lampe de chevet mais celle-ci ne fonctionne plus. Le réveil également est éteint. Le vent a dû provoquer une coupure de courant, pense-t-elle. Elle se relève, toujours habillée et sort de la chambre afin de voir si tout va bien chez Brandon et Mollie.

La lumière de la pleine lune pénètre la chambre de Brandon. Il dort paisiblement dans son petit lit. Kate sourit et l'embrasse sur le front. Elle se dirige ensuite vers la chambre de Mollie. La chambre est plus sombre puisque que la chambre n'est pas orientée vers le clair de lune. Cependant, depuis sa fenêtre, Mollie a une vue parfaite sur la maison de Gary et Val. Abby a vraiment bien conçu les plans de la maison. Quelle ironie, rélise Kate. Mollie dort avec tous ses jouets. Kate ôte les deux grandes poupées Furby et la stupéfiante Amy et les dépose par terre.

Un bruit provient soudain du corridor. Mollie bouge mais ne se réveille pas. Kate décide d'aller voir. L'obscurité lui joue des tours car elle a l'impression que ce corridor est deux fois plus grand qu'à l'accoutumée.

"Tu es perdue?" s'exclame une petite fille. Kate se retourne brusquement mais Mollie est toujours dans les bras de Morphée. Pourquoi j'entends cette voix? Où est Brian? Il ne peut plus être au bureau à cette heure-ci.

La voix d'un homme se fait entendre dans la chambre de Kate et Brian. "Brian, enfin!" Elle se dirige vers la chambre alors que le vent hurle à l'extérieur.

"Qu'est-ce que tu vois?" demande la même voix de petite fille.

Kate s'enfuit sans se retourner. Elle entend clairement une voix d'homme dans sa chambre, mais ce n'est pas Brian. Son coeur bat la chamade. Son corps est envahi de frissons. Elle n'ose pas avancer plus loin dans le corridor. Elle aperçoit quelqu'un dans la pénombre.

"Brian?"

"Kate, c'est toi?" Un visage apparaît dans le faisceau de lumière nocturne que laisse échapper la porte de la salle de bain, restée ouverte.

Kate identifie la voix et le visage de l'homme qui se tient devant elle, à l'entrée de sa chambre. Elle est tétanisée et ne parvient plus à faire un seul mouvement. Ses pieds sont comme cloués au sol.

L'homme sourit. "Ça fait longtemps qu'on ne s'est plus vus. Je n'ai même pas le droit à un petit bonjour? Et si on chantait 'Dead skunk in the middle of the road'?"

"Steve?!" Kate est en état de choc. "Mais... tu es mort... abattu… devant moi..."

Dès qu'elle prononce ces mots, une tâche rouge se répand sur la chemise de Steve Brewer, et s'agrandit. Il met ses mains sur sa poitrine et la regarde. "Kate! Non! Ne pense pas à ça! Tu me vois comme dans tes souvenirs. Pense aux fous-rires qu'on a eus ensemble."

Kate sourit et repense à Steve, tout sourire, devant sa vieille camionnette. Elle se décrispe et peut s'approcher de lui. Elle rentre dans sa chambre.

"Oui, Kate, c'est mieux," dit-il avec soulagement. La tâche de sang se rétracte et disparaît de sa chemise. Il observe la pièce. "C'est différent de mon vieil appartement. J'aime la décoration. C'est sobre. Par contre, le reste de la maison? Tous ces excès de matérialisme, c'est révoltant! Comment tu peux supporter ça?"

"Je n'ai rien à voir avec le reste de la maison."

"Mais c'est ici que tu vis. Tu peux changer des choses."

Kate fronce les sourcils. "Tu as déjà vu l'intérieur de cette résidence?"

"Bien sûr. Depuis le jour où tu as emménagé. J'ai vu les différents lieux où tu as habités depuis mon appartement. Le ranch et la maison des monts Hampton étaient mes préférés. Toi aussi d'ailleurs."

"Comment sais-tu tout ça? Je ne t'ai jamais parlé de ma maison des monts Hampton."

"Non, mais je te suis depuis ma mort. C'est là que tu habitais l'été quand tu étais à New York avant de te marier. Tu avais l'habitude de récolter des coquillages sur la plage avec ta fille. Même si Brian te manquait, même avec une solitude pesante, tu aimais vivre dans les monts Hampton. Maintenant, Brian te manque aussi, tu ressens une certaine solitude mais en plus, tu dois te farcir une belle-mère narcissique, un cowboy sans cheval et une belle-soeur , au demeurant jolie, mais plutôt envahissante."

Kate éclate de rire avec Steve. Ensuite son visage s'attriste. "J'ai beaucoup pensé à toi, au cours de toutes ces années, Steve." Ses yeux s'emplissent de larmes. "Tu me manques.”

"Pourquoi?" Il la regarde avec force.

"Parce que je t'aime. Tu es mon frère."

"Plus ou moins." Il sourit et répond au regard interrogateur de sa soeur. "Nous n'avons pas été élevés ensemble, après tout. Claudia l'a voulu ainsi.”

"Où est Maman?"

"Elle surveille. Je dois bientôt la relever. Nous sommes une équipe désormais, tu peux le croire. Elle a tout fait pour se débarrasser de moi vivant, et maintenant nous sommes inséparables. Je ne vois même plus mes parents adoptifs. Depuis que Claudia nous a rejoints, je suis chargé de l'aider. C'est la chose la plus dure que j'ai jamais dû faire. Elle est si obstinée, têtue..."

"Elle a voulu que tu sois adopté parce qu'elle a estimé que c'était la meilleure chose à faire, Steve. Paul Galveston aurait fait de ta vie un enfer si elle t'avait gardé. Au lieu de cela, tu as été élevé par des parents qui t'ont aimé très fort. Tu es un devenu un homme de qualité grâce à eux."

"Je comprends, Kate. Eux aussi. Et Claudia apprend aussi... petit à petit. Sans le vouloir, elle a modifié les chemins que nous aurions dû suivre, tu vois. Nous quatre : toi, moi, Mary Frances et Paige. Nous aurions dû grandir très près les uns des autres."

Kate sent une chaleur indicible lui parcourir la moelle épinière. "Nous quatre?"

"Oui, mais nos parents ont tout gâché parce qu'ils ne s'entendaient pas. Et maintenant, de nombreuses âmes dans l'au-delà s'efforcent de réactiver ces chemins jamais empruntés. Mes parents adoptifs les Brewer ainsi que ton père le professeur Whitaker se sont donnés beaucoup de mal après leur mort pour que toi, moi et Paige soyons réunis. Mais Claudia a tout flanqué par terre en cachant cette arme dans ma camionnette. Ecoute, je n'ai plus beaucoup de temps et tout ce que je pourrais ajouter serait incompréhensible à tes yeux. Je veux que tu saches que tu es la clé. Le destin va provoquer de nouveaux événements, Kate. Il faut que tu sois forte afin que tous ces événements se révèlent positifs."

"Quels événements?" demande Kate, inquiète. "Que va-t-il se passer?"

"Des choses positives, si tu es forte. Tu ne me verras plus mais je reste à tes côtés. Je comprends mieux maintenant. Il faut que je parte. Claudia m'attend. Ça a été agréable de fuir sa compagnie un instant." Steve recule de quelques pas et s'engouffre dans l'obscurité de la chambre, là où le clair de lune ne perce pas.

"Ne me laisse pas seule, Steve! J'ai peur!"

"Il ne faut pas. Tu as tant de bonté en toi. Après la mort de mes parents et ma sortie de prison, tu as eu une telle influence positive sur moi, Kate. Tu as toujours été agréable envers moi avant même que tu saches que nous étions frère et soeur. Et ta douceur et ton amitié chaleureuse n'ont pas diminué après avoir découvert que j'avais fait de la prison. Garde cette douceur et puise dans tes forces..." La voix de Steve disparaît avec son ombre.

Kate retrouve ses esprits et se rend compte de la force du vent à l'extérieur. Sa respiration est haletante, elle sanglote. Elle va dans la salle de bain. Le courant n'est toujours pas revenu. Elle s'asperge abondamment d'eau sur le visage et perçoit son reflet dans le miroir. Elle s'essuie le visage à l'aide d'une serviette.

"Qu'est-ce que tu vois maintenant?" répète une nouvelle fois la voix de petite fille à travers le vent. "Tu es perdue?"

"Oui," soupire Kate. Pourquoi je ne me sens pas chez moi ici? Où est donc Brian ?

Elle retourne dans sa chambre et aperçoit une ombre assise sur son lit.

"Maman?" demande Kate dans un soupir. De nouvelles larmes coulent sur ses joues.

"Katie, je ne suis pas censée être ici. Steve m'a dit que c'était encore trop tôt mais il fallait que je vienne!" Claudia met sa main à la bouche et résiste à l'envie de pleurer. Kate s'assied sur le lit, près de sa mère avec un sentiment de force intérieure.

"Je ne te vois pas bien, Maman. Il fait si sombre."

Claudia acquiesce. Elle regarde sa fille dans les yeux. Kate ressent un énorme flux d'amour. "J'ai tellement honte, Katie. J'essaie d'écouter Steve et de l'aider. Il est très patient avec moi." Claudia hésite.

"Maman, que se passe-t-il? On dirait que tu veux me dire quelque chose? Sommes-nous encore en danger-"

"Non, ma chérie," répond Claudia d'un ton rassurant. "Cette bombe placée dans mon coffre ne visait qu'à tuer ton oncle Greg. Toi et les enfants n'avez rien à craindre.”

"Mais oncle Greg? Il est encore en danger?"

"Il est intelligent et très bien protégé. On ne pourra plus le piéger. Si toi et lui continuez à agir comme vous le faites, alors tout ira bien." Claudia hésite sur ses mots.

"Quoi? Maman? Tu as quelque chose d'autre à me dire?"

"Je ne peux pas." Claudia s'interrompt. "J'aurais tant de choses à t'expliquer. Mais... Il faut que tu trouves ton chemin. Je te surveille... je ne peux pas en dire plus... j'espère que tu pourras me pardonner un jour..." Claudia se cache le visage avec les mains.

"Tu me fais peur, Maman. C'est toi que j'entends quand je suis seule. C'est toi qui parle avec une voix de petite fille?"

"Non, ce n'est pas moi, ma chérie. C'est ta mémoire... Tu as entendu ces mots pendant des années... avant ma mort..." Kate attend des explications supplémentaires mais Claudia ne dit mot. Elle a toujours ses mains sur son visage.

"Steve avait raison. Il est encore trop tôt pour te voir de si près," ajoute Claudia. Elle regarde à nouveau sa fille en souriant. "Katie, tu es une femme superbe et t'élever fut la meilleure chose que j'ai faite dans ma vie. Je t'aime tant. Je sais que tu surmonteras toutes ces épreuves. Steve m'a dit que je devais observer tous les changements qui vont affecter ta vie. Ça fait partie de mon apprentissage. Souviens-toi qu'il n'y a a jamais eu un seul instant où je ne t'ai pas aimé."

Kate pleure en silence. "Je sais. Tu me manques. J'ai tant besoin de toi en ce moment. Tellement, Maman! Je me sens si seule." Kate ressent une profonde douleur en elle.

"Tu n'es pas seule, Katie." La voix de Claudia s'éloigne. "Tu n'es JAMAIS seule!"

Kate ne cesse de pleurer. Elle sait qu'elle ne verra plus le visage de Claudia lorsqu'elle va relever la tête.

"Pourquoi tu pleures, Maman? Tu as peur du vent? Il n'est plus aussi fort maintenant. Où est papa?"

Réalisant que le vent s'est calmé, Kate lève la tête et sourit à sa fille qui se tient debout face à elle, une poupée dans les mains. Soudain, la lampe de chevet s'allume, tout comme le lustre de la salle de bain.

"Viens ici." Kate serre Mollie dans ses bras. "La lumière est revenue, chérie. Heureusement que nous sommes revenues de la pizzeria avant la coupure de courant, hein?"

"La petite fille hoche de la tête. "Je peux dormir avec toi jusqu' à ce que papa revienne?"

"Oui. J'aimerais bien," répond Kate. Elle regarde le réveil. Il est minuit passé de cinq minutes.

 

Les bureaux des Propriétés Ewing :

Le large bureau central des Propriétés Gary Ewing est illuminé légèrement par la lueur phosphorescente du clair de lune. L'immeuble est calme sans les bruits habituels des ascenseurs, des bourdonnements électriques en tout genre et des vrombissements de la climatisation.

Gary Ewing n'est pas habitué à ce silence et se rend compte que les bureaux sont enveloppés d'une odeur de pin. Hmm, je n'avais remarqué, pense-t-il. C'est peut-être pour cela que j'ai choisi cet emplacement, inconsciemment. Il me rappelle les bois du Texas.

Vingt minutes se sont déjà écoulées depuis la coupure de courant et Gary se surprend à profiter de cette solitude et de ce calme inattendus. Je vais attendre encore un peu. Même avec Lucy, Paige et Ava travaillant d'arrache-pied sur les différents projets, il y a des tâches que seul leur cowboy de patron peut exécuter, marmonne Gary.

Irrité par le retard que provoque cette obscurité soudaine, Gary décide d'utiliser les bougies entreposées (pour les cas d'urgence) dans l'armoire située derrière son bureau. Après avoir cherché dans différents tiroirs, il met enfin la main sur les épaisses bougies et les briquets.

Le fils prodique Ewing dispose les bougies sur les coins de son bureau et les allume. C'est beau, se dit-il. Une lueur jaune se mêle à la légère clarté de la nuit. On dirait un crépuscule à Southfork, pense-t-il.

Il remet le briquet dans le tiroir et admire cette atmosphère dans laquelle est plongé cet espace. Il ne sait pas encore ce qui l'attend.

Un crépuscule magnifique se dessine devant lui, à l'instar de ceux qu'ils admiraient, enfant, au ranch de Southfork près de Dallas. Les mélanges de rose, d'orange et de bleu lui coupent le souffle lorsque la silhouette d'un homme à cheval s'approche de lui. Oooh, j'hallucine, pense Gary, ce spectacle est irréel.

OK, Gary, reprends tes esprits. Ta main est toujours agrippée à la poignée de cette armoire, donc tu n'es pas en train de rêver. Il se retourne et, à sa grande surprise, ce n'est plus une poignée d'armoire de bureau qu'il tient dans la main, mais bien les rênes de son cheval d'autrefois, qui se dresse majestueusement devant lui.

"Screwdriver!" s'écrie-t-il. "Mais... mais tu es mort quand j'avais 13 ans..."

"Beau spécimen, n'est-ce pas?" Gary est paralysé sur place en reconnaissant cette voix instantanément. "Gary, mon garçon?"

Pris d'une colère fulgurante, Gary se retourne et fait face à son père. "Oh, voilà qui est parfait!! J'ai la plus incroyable de toutes les hallucinations et le grand Jock Ewing sur son cheval vient la gâcher!"

D'un sourire hagard, Jock se retrouve debout, face à son fils. "Attention à ce que tu dis, mon fils. Je suis toujours ton père." Gary est prêt à combattre le vieil homme mais son père le coupe une nouvelle fois. "Maintenant, tu te calmes. Je ne suis pas venu pour savoir qui est le plus fort."

"Alors pourquoi ES-tu venu? Et pourquoi par l'entrée principale de Southfork? Tu n'as jamais aimé cette terre!" Gary est en colère.

Jock sourit et reste calme face au manque de respect évident de son fils. "Là tu as tort, Gary. J'ai consacré ma vie à préserver cette terre pour votre mère et pour vous les garçons. Bon sang, pourquoi crois-tu que j'ai créé les Pétroles Ewing?"

"Je..." Gary bégaye.

"Mais ça ne t'est jamais venu à l'esprit, hein?" demande Jock.

"Non, monsieur..." Gary parle d'une voix basse.

"Parle plus fort, Gary. Tu ne dois avoir honte de rien."

Les yeux de Gary font face à ceux de son père. "De... rien?"

"Bien sûr que non. Tu es devenu un homme bien. C'EST ce que je suis venu te dire." Jock aperçoit une larme couler des yeux de son fils. "Tu as attendu toute ta vie pour entendre ces mots de ma bouche. Je comprends maintenant. Je compends mieux certaines choses maintenant."

La simple larme se transforme en sanglots continus. "Papa, tu... tu peux rester un moment?"

"Non, mon fils. Mais tu sais ce que j'aimerais faire pendant ce court instant? Allons faire un tour à cheval."

Les yeux de Gary s'écarquillent et se voit à cheval avec son père à ses côtés. Les deux hommes galopent à travers les étendues du ranch dans une furie sauvage comme s'ils devaient exorciser des décennies de colère et d'affrontements. Ils parcourent ces espaces pendant des heures avant de s'arrêter au bord d'un petit étang. La lumière de ce crépuscule éternel vibre dans les eaux du bassin naturel.

Jock s'adresse à son fils. "J'ai attendu une vie entière avant cette course. Il faut que je m'en aille maintenant, mon garçon. Laisse-moi te dire une dernière chose. Continue à faire ce qui te rend unique, mon garçon. Ne laisse jamais quelqu'un te convaincre d'agir autrement. Ce que j'ai perçu comme de la faiblesse chez toi pendant des années était en fait un équilibre de qualités que je n'ai jamais su rallier pendant toute ma vie d'homme.”

Jock dirige son cheval près de celui de Gary et lui tend la main. Gary étend son bras vers cet homme à qui il n'a jamais serré la main. Cette poignée de mains est des plus chaleureuses et, du haut de leur cheval respectif, les deux hommes finissent par s'embrasser comme jamais.

Les yeux rougis, Gary voit son père s'éloigner dans la lumière jaune du crépuscule. La lumière s'intensifie, aveuglante, avant de s'adoucir et de réapparaître comme la douce lueur de plusieurs bougies combinées dans un bureau d'entreprise sans électricité.

Gary souffle sur les bougies et soupire avec force. Il sourit dans l'obscurité de la nuit. Je ne sais pas si c'était vrai ou non... mais je ferais tout comme!

 

Et Maintenant...

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